Nous sommes en 1922, plus précisément le 13 février, au cours de leur réunion matinale M. Henri Kratz et M. Xavier Grandvoinnet décident, au livre des PROCÉS VERBAUX DES DÉCISIONS (cf. photo), la construction d’un Jouet EXCEPTIONNEL, une voiture à pédales équipée d’un MOTEUR MÉCANIQUE,
« muni d’un appareil qui permettra la propulsion mécanique. Le dispositif imaginé par M. Grandvoinnet parait donner toute satisfaction et sa mise au point sera poursuivie activement. etc. » (cf. Livre des Procès Verbaux des Décisions)
9 mois plus tard, Le catalogue EURÉKA de fin d’année 1922 proposera le premier modèle SPORT, une VOITURE A PEDALES A MOTEUR MÉCANIQUE.. Tous les modèles dénommés « SPORT » qui suivront seront équipés de ce moteur performant qui sera sans cesse amélioré pour aboutir au dernier :« GRAND-PRIX ».
Voyons aujourd’hui cette fameuse SPORT 22, EK1, la première voiture à pédales construite PAR EURÉKA, un peu plus en détail.
Ce modèle à fait l’objet de 3 brevets, de septembre 1921 à décembre 1922.
N’oublions pas que depuis le début de son entreprise, en 1882, M. Kratz est un ferblantier, les parties en tôle de cette auto sont donc en fer blanc, fine feuille de tôle d’acier trempée dans un bain d’étain.
On comprend mieux, en regardant attentivement mon exemplaire en ÉTAT D’ORIGINE, que bien qu’il ne présente aucune trace d’oxydation, et comme la couche d’apprêt n’a jamais été l’apanage d’Eureka, la raison pour laquelle la peinture de son capot et de son siège se décolle partiellement sur ce fer « étamé ».
M. Grandvoinnet, ingénieur dernièrement embauché, modifiera un peu plus tard l’utilisation des matières premières..
L’allure générale de cette auto, et notamment son faux radiateur, rappelle indéniablement les Chenard & Walcker, tout comme les suivantes Sport 23 et Sport 24. (la BB 25 sera la première à vouloir se référer aux Bugatti).
Sa construction, comme celles de nombreuses voitures à pédales de cette époque, sur un châssis et une caisse en bois de hêtre vernis, n’utilise que peu de métal mais sa mécanique innovante est unique et redoutable.
M. Grandvoinnet a conçu là un système qu’il utilisera, en l’améliorant à chaque fois, sur chacun de ses modèles Sport, et que l’on ne retrouvera jamais sur un autre jouet, hormis chez Violletta qui s’inspirera de ce système performant pour en équiper ses fameux bateaux à pédales RIVA ARISTON JUNIOR.
Afin de construire une auto digne de ce nom, à cause de la vitesse obtenue, il faut penser au freinage, et c’est le principe de la sangle en feuillard sur un tambour qui est retenu, celui-ci perdurera. Un levier, par traction manuelle sur une tringle, serre la sangle de frein autour du tambour en hêtre.
Pour la marche arrière il faut débrayer, cette action est confiée à un autre levier à main et à une tringle qui, par traction, fait coulisser le pignon d’entrainement de l’essieu moteur pour assurer une roue libre.
La suspension, déjà, est assurée par 4 ressorts compensés soit 8 ressorts, sur 4 roues indépendantes… DÉJA !
La direction n’est pas encore » à crémaillère », (cette technique sera adoptée en 1933 sur les Sport 33, biplace côte-à-côte, et Grand-Prix), seulement par tringles, la « colonne » étant dirigée par un volant à 3 branches en métal sur une jante en bois.
Cette auto à pédales bien équipée reçoit également un éclairage, grâce à une Énorme Pile, commandé par un contacteur fixé sur le moyeu du volant.
Le tableau de bord se compose d’un simple losange en métal nickelé pointé sur une planche.
Finalement, seuls les roues, les 2 leviers (frein et de débrayage), le siège, et le capot sont peints, le radiateur ÉTAIT nickelé, dommage que mon exemplaire ait été barbouillé de peinture « tuyau de poêle » par une main maladroite.
Mais c’est excusable vu l’état d’origine extraordinaire de l’ensemble de ce jouet pourtant composé majoritairement de bois, encore en parfait état, fonctionnel et tout à fait complet.
Grâce à cet état exceptionnel, pour l’une des premières voitures à pédales Euréka c’est là, vraisemblablement, la pièce la plus inestimable de ma collection.
Tous ses éléments d’origine sont bien présents, le volant et son contacteur, les 2 phares, le siège particulier, le capot équipé de ses 2 adorables petites poignées, ses 4 attaches de fixation en tôle et ses ressorts, et ce premier emblème auto EURÉKA au centre du radiateur toujours surmonté de son gros bouchon à 6 pans.… Dans 2 ans n nous fêterons son centenaire !
Super article.
Belle pièce de collection
Olivier
Merci Olivier !
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Bravo Dominique! Magnifique! Merci de nous faire partager ton article sur une pièce centenaire aussi bien conçue et conservée. Seul le volant me choque.
Au contraire, la présence de ce volant à la jante en bois (fêlé certes) mais tout à fait d’origine, avec (encore) son contacteur, est une chance.
Par contre je crois savoir ce qui vous choque, c’est ce boulon beaucoup trop long qui fixe ce volant en lieu et place d’une simple goupille, encore une erreur de cette main maladroite qui a barbouillé le radiateur…
Je vais y remédier aujourd’hui même.